Nous sommes au 4ème jour de confinement général, le 20 mars 2020 et je suis inspirée… par cette situation inédite et nouvelle, ainsi que par les comportements humains que je continue à observer…
Cet article sera léger et sérieux à la fois, il parlera de la façon dont Fille et moi vivons le confinement et de quelques astuces pour les TSA, mais aussi de ce que j’observe depuis le début… j’en profiterai pour vous partager des articles qui vous amèneront à réfléchir (peut-être), à rire ou à vous occuper (en tous cas je l’espère).
Plus qu’un article, ce sera une lettre, le monologue d’une autiste parmi les autres, qui se retrouve dans la même situation que tout le monde (le monde entier même) et donc qui est, pour une fois, au même niveau « social » que les autres (que les neurotypiques pour être bien claire, et également au même rang social, puisque la richesse ou la pauvreté ne sont pas des remparts contre les virus ^^’ ).
Alors, tout d’abord, le confinement chez nous, c’était plus à partir du Dimanche 15 Mars, comme la décision avait été prise de fermer les établissements scolaires de tous niveaux, ce qui nous ramène à 6 jours. Cela dit, nous sommes sorties faire deux courses avec Fille le Mardi avant 12h, jour et heure qui marquent le début de l’obligation des attestations de sorties, avec l’éventuel contrôle de la police, à laquelle nous devons justifier de notre présence à l’extérieur, sous peine de prendre une grosse amende– j’avoue que ce point là m’a fortement stressée, au point de faire une crise (meltdown qui s’est soldé en shutdown plus tard) après avoir lu le message que vous avez sans doute reçu sur votre portable ^_^ . Moi je l’ai reçu à 8h, c’est ce qui m’a réveillée.
La crise passée, j’ai réveillé Fille, qui m’a suggérée d’aller faire mes courses avant l’obligation de l’attestation (avant 12h donc).
On a bien fait, on n’est pas sorties depuis pour ce genre de chose, et je pense tenir jusqu’à la semaine prochaine sans avoir à franchir de « check point »- je me permets d’utiliser moi aussi un langage qui rappelle la GUERRE, puisque nous sommes EN GUERRE, nous a répété Mr Macron dans son dernier discours (le dernier que j’aurais écouté… c’était aussi le premier d’ailleurs :’) ).
Je vais éviter ici le débat politique, cela dit, mon opinion, c’est que rien n’a été fait correctement, que des tas de gens auraient fait mieux, oui oui, et qu’à force de se contredire, ce gouvernement a perdu non seulement en crédibilité, mais a en plus perdu totalement les gens en ayant un discours flou.
Je vais également éviter de trop dire ce que je pense de la sécurité utilisée pour endiguer une épidémie virale, et de toutes ces applications qui sortent de l’ombre (et de l’illégalité?) pour venir au secours de la population mondiale, ou pour la surveiller plus fort, plus vite en se servant du virus comme prétexte… je vais éviter mais vous encourager à lire: « Coronavirus: The Low Tech of The High Tech » et si vous ne l’avez pas encore lu, je vous recommande (à nouveau pour ceux qui me suivent): « Mémoires vives » de Snowden. Puis je vous invite à lire « Depuis la Chine : De l’imaginaire viral à l’ethos épidémique » , c’est plutôt intéressant (et ça vous occupera 😀 ). Pour en finir avec cette parenthèse, je vous envoie vers Technopolice qui a lancé un appel à l’aide pour documenter la fuite en avant sécuritaire dans nos villes… Puisque nous avons du temps libre, profitons en pour découvrir des choses dont on ne se préoccupe pas assez le reste du temps 😉 (Enfin vous, pas moi :p ).
Puis tiens, passez donc lire un excellent thread de Olivier Tesquet
, vous y apprendrez plein de petits trucs passionnants tout en restant sur les RS… 🙂
Alors, comment avons nous vécu ce passage au confinement quasi total chez nous?
Les deux points négatifs pour nous, c’est cette histoire d’attestation (faite par nous même pour justifier de notre propre sortie, ça a été compliqué à comprendre- bien que facilement exécutable au final), et la « peur » d’être contrôlé alors qu’on ne fait rien de mal, comme je connais mes limites et que je peux me montrer agressive si on l’est avec moi (j’anticipe le pire, c’est « normal »)… Puis le fait de ne pas pouvoir faire de longues marches où l’on veut alors que c’est une routine pour Fille et moi et qu’habituellement on fait une moyenne de 10km par jour… « Routine » est égal à besoin vital pour nous, c’est donc une réelle difficulté que de changer ça… Oui mais voilà, c’est notre seule contrainte.
Concernant le reste des règles de bonne conduite à adopter pour éviter d’attraper ou de transmettre ce virus, à vrai dire, ça ne change rien du tout à ma vie personnelle. Je découvre avec amusement que c’est plus difficile pour les neurotypiques ce confinement… Fille est heureuse de n’avoir plus à se rendre au Collège où elle souffre du bruit et où elle se force à l’interaction sociale à l’insu de son plein grès toute l’année. Comme elle est en double scolarité CNED et établissement, elle a de l’avance quant au travail via le web et en autonomie, elle suit bien, fait son travail régulièrement, je suis là pour l’aider ou la soutenir et on s’entend bien pour ça… C’est presque le paradis pour nous. On peut le prendre comme des vacances ou comme une période de repos moral. Plus on avance dans le confinement, plus je me sens zen et apaisée par cette vie sans aucun stress « social ».
Il m’a fallu deux jours d’adaptation, car c’est compliqué de ne pas savoir combien de temps ça va durer, de ne plus avoir d’horaires à respecter- rappelons qu’on peut facilement se laisser absorber par nos IR et oublier de manger, de boire, de bouger, de communiquer etc… On se décale totalement et c’est pas bon sur la durée ^^ .
Heureusement pour nous, la psychomotricienne qui suit Fille nous a appelé pour prendre des nouvelles et nous donner des conseils (que vous pouvez noter pour vous même), à savoir: Se faire un planning horaire, avec un temps où on bouge (parcours psychomot fait par Fille, 20 minutes de marche à l’extérieur, exercices doux), les horaires devoirs, repas, temps libres, temps partagé, toilette, heures de levé et de couché… etc. Ceci est important parce que ce qui va être difficile pour nous, contrairement à vous autres les NT, c’est de retourner ensuite dehors, de nous réhabituer à faire des efforts de socialisation, de re supporter le bruit, les odeurs, la foule et toutes ces choses qui disparaissent en confinement… Le confinement pour nous, c’est juste nous enlever toutes les choses qui nous stressent et nous fatiguent énormément en lien avec l’extérieur et la société.
Personne pour nous imposer un serrage de main ou des bises, personne pour nous parler alors que c’était pas prévu au programme… personne, juste Fille et moi (and the cat), dans notre bulle, avec notre petit planning, qui nous convient parce qu’on l’a décidé ensemble… Du temps, du temps pour tout, du temps pour cuisiner, vaquer à nos IR, du temps pour dépasser un peu nos horaires planning sans que ça n’occasionne de graves chamboulements… Du temps dont nous comptons profiter.
J’anticipe le moment où je vais devoir sortir pour faire des courses, mais je suis déjà très organisée quant à ma façon de faire, la seule chose qui change c’est de faire la queue pour rentrer dans le magasin. Pour le reste, je ferai comme d’habitude, vite et en suivant ma liste \o/. Comme j’y suis allée Mardi et que c’était déjà réglementé, je sais comment ça se passe, et je peux vous jurer que je préfère quand on est peu nombreux dans le magasin.
Voilà, vous l’avez compris, on le vit plutôt comme une aubaine nous, ce confinement. Mais ce n’est pas le cas de tout le monde, je m’en rends bien compte, et en premier lieu sur les RS, puisque dehors, et je suis en centre ville, la seule chose qu’on entend sont des oiseaux, et de temps en temps on peut croiser un coureur ou une personne revenant des courses ou promenant son chien… Je sors tous les jours 20 minutes pour marcher avec Fille, et c’est le seul moment où je vois ça comme le reste du temps je ne reste pas collée à mes fenêtres à m’adonner au voyeurisme… et les gens ne font pas de bruit, aucun ne nous a encore sauté dessus pour nous refiler des microbes en nous toussant au visage… Je peux concevoir que ce n’est pas partout comme « chez moi » cela dit, mais je discerne quand même l’exagération de certains sur les RS…
Certains deviennent agressifs, les gens se jugent sans avoir compris correctement ce qui leur a été expliqué. (J’en profite pour rappeler que les gestes barrière et la distanciation sociale sont le plus efficace pour empêcher la propagation d’un virus, quel qu’il soit!).
Les fakes News et les titres des journaux totalement anxiogènes font paniquer des gens (qui ne profitent pas de leur temps libre pour vérifier et creuser les informations), certains réclament plus d’amendes, plus de contrôles, plus de sécurité, ils semblent passer leur temps à épier ce que font les gens autour de leurs fenêtres… (et avec tout ce qu’ils racontent voir, ils ont beaucoup de fenêtres), certains oublient que tout le monde n’a pas fait trois mois de réserve de bouffe pour se permettre de rester cloîtré dans leur logement, bref les gens jugent, les gens font les commères (les méchantes, tu sais, celles qui aboient comme des teckels) mais les gens ne lisent pas des choses qui pourraient les remettre un peu à leur place… Comme « Dis moi comment tu te confines et je te dirais à quelle classe sociale tu appartiens » … Les gens sont plus difficiles à cultiver que les légumes… (pardon, fallait que je la sorte).
L’ ambiance devient lourde sur les RS, et d’un côté tant mieux parce que s’il y a une seule chose sur laquelle je trouve que le discours du président était intéressant c’était sur « le recentrage sur l’essentiel », et mon essentiel à moi, ce ne sont pas les RS. Le RS, c’est un outil de partage et d’entre-aide pour moi, à la longue on finit tous par y trainer de trop et par se faire manger son peu de temps de cerveau dispo par des conversations stériles et du combat d’ego… Et puis laissez moi vous promettre qu’on n’a pas besoin des RS pour s’informer, pour ça y’a des tas de sites que vous pouvez consulter à tout moment…
Je ne parle pas volontairement du virus, je trouve qu’on en parle assez et qu’on n’a pas fini d’en parler, ce qui est logique. Je pense qu’il vous renvoie à beaucoup cette idée véritable qu’on n’est pas du tout éternel, vos loisirs et travail vous ont fait oublier ça peut être, c’est pourtant comme ça depuis toujours.
Des gens parlent d’une déstabilisation, on sait qu’il y aura un après, je vous partage le point de vue du philosophe Dominique Bourg: « Assiste-t-on à l’effondrement de notre monde? » … J’aime bien cette idée de changement perso.
Ce matin j’apprenais que les politiques essayaient de faire passer de nouvelles lois sur le travail, intéressez vous à ce qui se passe de ce côté là, il semble que les choix de ces gens là poussent plutôt du côté de la régression plutôt que vers le progrès…
Et puis ben, bon confinement à tous, vous trouverez des tas de tutos et conseils partout pour occuper vos enfants, apprenez à les connaître en passant vraiment du temps avec eux, discutez, jouez, regardez de beaux reportages, et pour ceux qui sont seuls, courage, tout passe, cette situation prendra fin à moment donné, essayez de vivre ça au mieux, puis si vous me lisez, c’est que vous n’êtes pas si seul, on est parfois une grande famille sur le web 😉 .
Salutation distinguées à deux mètres de distance! (Just_Autist).
1 Commentaire
J’ai ressenti le confinement comme vous et je pourrais reprendre le travail depuis cette semaine (autoentrepreneur) , mais je remets les choses aux calendes grecques… cela me plaisait bien cette période où tout était simple!
Dès les premiers jours du dėconfinement nous avons eu des visites à l’improviste, et comme par hasard de personnes que je n’avais pas trop envie de voir, stress!
Eux étaient dans les starting blocks pour filer voir du monde aux premiers jours de la première semaine de sorties sans attestations, je redoutais une visite ou deux mais là cela a été tous les jours voire plusieurs fois par jour que l’on arrivait chez nous sans prévenir ! Et certains savent que je suis autiste mais seul leur isolement enfin rompu comptait!
L’un de nos voisins inconnu s’est aussi présenté pendant le confinement devant la barrière du jardin pour « faire connaissance » à deux mètres de distance j’ai rien compris à sa démarche! Je ne suis pourtant pas asociale mais je vois bien que mon cerveau et le leur sont autres!
» On reste chez soi si on veut sauver des vies » c’était limpide quand même ! Si je suis dans mon jardin je ne suis pas « dehors » et encline à sociabiliser, je suis à la maison pas habillée pour l’extérieur, et je me suis sentie jugée à mon allure (ha vous êtes rock’n’roll avec vos tatouages) , et ma réceptivité était très maladroite vu que zéro préparation …
Rien que de vous décrire tout ça j’en ressens encore la densité sensorielle et émotionnelle !