Retour à Autour de l’autisme

Votre enfant a reçu un diagnostic d’autisme/ TSA/ Asperger…

Vous avez couru, cherché, rencontré des spécialistes qui ont décortiqué votre situation familiale, vous ont posé des questions parfois troublantes, eu des problèmes avec certains et avec d’autres de belles surprises. Votre enfant a du passer des examens médicaux, passer des bilans divers et variés, vous avez sûrement découvert des choses et connu de grands moments de solitude… Oui, pour en arriver à ce diagnostic final, vous avez lutté, je le sais, comme un guerrier, parfois soutenu, souvent lâché en cours de route par des gens pas aussi solides que vous (et surtout pas concernés, d’ailleurs finalement, cette épreuve vous aura assuré de vos amitiés ou aura mis un terme à des relations dont vous pouviez vous passer…).

Vous avez compris, ou on vous a fait comprendre que votre enfant avait des difficultés, des particularités, qu’il n’était pas tout à fait comme « les autres », et vous, et bien vous avez fait au mieux pour lui/elle, vous vous êtes retrouvés dans un océan de doutes, avec une barque qui prenait l’eau et vous avez sorti les rames \o/!

Le jour du diagnostic final, au CRA ou chez un libéral, peu importe, vous êtes trempés jusqu’aux os, épuisés par ce combat entre l’océan des doutes et vos propres convictions (mêlées à celles de vos copains de fortune du net), essoufflés par toutes les fois où votre barque s’est retournée et où vous avez du porter votre enfant pour l’y remettre et repartir dans la tempête des rendez-vous et des prises en charge qu’on vous a conseillé chemin faisant… Vous avez souffert, je le sais, vous avez pleuré, vous avez été victimes d’injustes propos de la part de certains membres de votre famille, de l’école, (l’océan des doutes est rempli de poissons qui mordent avec leurs reproches, et vous vous êtes aussi mordus certainement), vous avez peut être perdu votre travail ou choisi de le quitter, votre vie a changé, vous vous êtes peut être reconnus au travers des bilans de votre enfant, mais vous êtes arrivés sur l’île du diagnostique, et vous allez pouvoir changer d’embarcation, celle ci ne prendra plus l’eau comme avant, et de temps en temps quelques spécialistes rameront à votre place, et bientôt, votre enfant tiendra les rames avec vous (si si, c’est possible), et vous reprendrez la route un peu plus sereinement, disons plutôt qu’au moins, vous saurez où vous plongerez les rames pour bien avancer. Il y aura d’autres tempêtes, vous boirez quelques tasses, mais au moins, vous savez maintenant pourquoi vous luttez…

Voilà, vous y êtes arrivés, je me dois de vous féliciter pour votre courage et votre ténacité, bravo, mille fois, vos efforts ne seront pas récompensés par une médaille, mais ce sont ces efforts qui vont aider votre enfant à se construire, à s’épanouir, à grandir dans le monde des neurotypiques (cette jungle), et vos efforts qui vont faire qu’il sera inclus dans la société, pas en claquant des doigts, ça va être long, on n’est pas au pays de Oui-Oui et je ne suis pas une vendeuse de rêves, je ne peux donc pas vous mentir, vous avez gagné un énorme combat mais vous êtes toujours un peu en guerre, c’est vrai… et ça dépend beaucoup de ses propres difficultés, puisque vous avez du le lire ou l’entendre, il y a autant de formes d’autismes que d’autistes… donc vous allez devoir tracer sa propre route, et le guider au mieux.

Ce que vous avez vécu, je l’ai vécu également, et j’ai trouvé qu’il était essentiel de vous féliciter et de vous rendre hommage, que vous soyez vous mêmes autistes (coucou les parents qui ont compris qu’ils étaient autistes grâce à leur enfant *petit flapping amical* ) ou que vous soyez neurotypiques…

Ceci étant fait, et soyez bien assurés de ma sincérité, passons à votre enfant maintenant, car en réalité, vous le savez, c’est de lui et de son diagnostic dont il est question ici, et il mérite autant, voir plus, de félicitations que nous, qui devons savoir nous effacer un peu dans tout ça… Le guide marchant aux côtés de l’enfant, et non devant. Et il faudra aussi apprendre à rester derrière et à patienter quand il avancera en âge, ceci étant essentiel à son ouverture au monde et à son autonomie. (Sauf diagnostics très invalidants qui accompagneraient le diagnostic d’autisme évidemment, je ne me permettrai pas de parler pour cette catégorie là, qui n’est pas de mon domaine- je parle ici des diagnostics annoncés en titrage).

Il/elle est autiste, il/elle est différent de la « norme » établie, il/elle a des besoins particuliers auxquels vous allez devoir répondre, et vous allez devoir trouver les prises en charge dont il/elle a besoin, si ce n’est déjà fait. Vous n’avez pas du tout à faire le « deuil » de votre enfant, il n’est pas mort, il est celui que vous avez mis au monde, il évolue chaque jour, même si vous avez parfois l’impression qu’il stagne ou qu’il régresse, gardez en tête que le développement de tous les humains se fait par étape… C’est votre enfant depuis le début, il est comme il est, unique, et il n’est pas et ne sera jamais neurotypique, quoi que vous fassiez pour le « normaliser », il restera lui-même. D’ailleurs j’ai la conviction (et de multiples parcours d’autistes en exemple, ainsi que de multiples échanges avec des spécialistes) que si vous vous mettez en tête de le normaliser, vous vous trompez de combat, et vous risquez d’en faire les frais plus tard, au même titre que lui/elle, puisqu’il risque de perdre confiance en lui (je finirai cet article en disant « lui », votre enfant, mais je n’oublie pas les filles, surtout pas, donc ne me qualifiez pas de sexiste s’vouplait ^^ ) et peut être de développer des troubles qu’il n’avait pas au départ.  ça peut clairement nuire à son autonomie également.

Voilà, vous avez le diagnostic de votre enfant, vous n’avez plus qu’à avancer maintenant et à l’aider à comprendre le monde qui l’entoure, prenez conseil auprès d’autres autistes, de spécialistes qui interviennent auprès de lui, n’hésitez pas à demander quand vous ne comprenez pas le comportement de votre enfant ou que vous ne savez pas comment réagir, il existe des tas de « clefs » qui vont vous ouvrir les portes de l’autisme, j’insiste, des tas de clefs, pas une seule, vous allez finir cette expérience avec un trousseau de clefs que vous pourrez échanger avec d’autres parents, d’autres autistes, des professeurs et même avec des spécialistes. Il n’existe pas de méthode parfaite pour éduquer un enfant, autiste ou pas, le mode d’emploi c’est vous qui allez le créer, vous ferez des erreurs, comme nous tous, et vous ferez des choses tellement géniales que vous aurez à coeur de les partager pour en faire profiter d’autre enfants  😉

Soyez patients, tous les autistes sont capables d’évolution, mais selon ce que nous sommes et à notre rythme, ne regardez pas l’évolution du voisin, concentrez vous sur votre enfant. Laissez le faire ses erreurs, comme vous avez du déjà le lire ou l’entendre, nous apprenons beaucoup par essai/erreur, c’est essentiel à notre compréhension du monde, des relations aux autres et du vivre ensemble.  Expliquez, reprenez les choses essentielles avec lui après coup.

Ne le surchargez pas d’activités pour faire « comme les autres », et ça vaut pour les prises en charge, il faut savoir un peu lâcher prise sur certaines choses dans le temps, si votre enfant est verbal écoutez le (s’il est non verbal, soyez attentif à son comportement), s’il refuse de faire une chose que vous pensez bien en tant que neurotypique, mais qui n’est pas de l’ordre de la santé, réfléchissez à l’utilité de la chose et à l’intérêt qu’elle représente pour votre enfant. J’ai eu l’occasion d’échanger au sujet du « forcing » dont j’ai été victime (et je choisi bien le mot) durant mon enfance, et dont j’ai protégé ma progéniture envers et contre tout ce qu’on a pu me dire (ex: « ces enfants là il ne faut pas leur laisser le choix », « elle doit faire comme les autres pour s’intégrer », « si elle refuse c’est toi qui dois décider à sa place », « si elle ne vient pas elle pénalise le groupe classe » -_-‘ …), heureusement que j’ai eu le soutien de psychiatre et psychologue qui m’ont récupérée post crise et aidée à comprendre que je prenais les bonnes décisions et en connaissances de causes pour mon enfant. Il y a des choses que votre enfant refusera de faire une année (partir en voyage avec sa classe, partir au ski une deuxième fois, la première fois ayant été catastrophique pour lui, aller chez quelqu’un avec qui il n’est pas à l’aise) et qu’il fera un jour, quand il se sentira prêt, assez solide. Acceptez que tout ne se passe pas toujours comme vous le voudriez, laissez lui du temps pour lui, laissez le choisir ses occupations, même si elles ne correspondent pas à cette foutue norme de l’enfance « parfaite » en Neurotypie. Vous lui éviterez un stress conséquent, à vous aussi, et cela vous permettra de vous concentrer sur d’autres choses plus essentielles à sa survie et à la votre, (apprendre la politesse, à se laver, à exprimer ses émotions etc…).

Soyez son complice, son référent, celui sur qui il saura qu’il peut compter en cas de problèmes, encouragez le, même quand il ne réussit pas totalement  (« je suis nul(le) », « j’y arriverai jamais »), démontrez lui qu’il a fait des progrès sur certaines choses quand il se sent en échec, et qu’aussi minimes qu’ils soient ils sont une réussite quand même, montrez lui votre fierté devant tous ses efforts. Je vous dis d’être patients, mais il lui faudra aussi apprendre à l’être…

Pensez, quand il est scolarisé ou dans un lieu autre qu’une école (vu le retard en France -_-‘) et quand il a des prises en charge pour ses difficultés, que quand il rentre à la maison, il est épuisé de sa journée (lui aussi), n’attendez pas de lui qu’il suive des règles en permanence, laissez le souffler vraiment. Laissez le décompenser autant que possible, laissez lui une marge pour ses routines, il en a besoin… Faites de votre maison, sa bulle, plus il s’y sentira en sécurité et en droit d’être juste lui même, plus il sera « open » quand il devra en sortir. La maison c’est l’endroit où il recharge son capital « cuillères ». Je ne vous incite pas au « laxisme » (comme certains parents semblent vouloir le comprendre), mais à une grande souplesse dans l’éducation telle qu’elle est conçue par la société en général.

« On n’éduque pas un enfant autiste comme un éduque un enfant qui ne l’est pas »– (Phrase validée par plusieurs spécialistes avec qui j’ai eu l’occasion de partager ma vision de l’éducation d’un enfant autiste, au cas où ma parole d’autiste ne vous semble pas suffisamment crédible). L’excès de règles hyper « oppressives » est une mauvaise idée, le stress constant nous abime sur la durée.

Voilà, vous avez le diagnostic de votre enfant, et son avenir entre vos mains, vous n’êtes pas les seuls, et vous n’êtes pas seuls, et il n’est pas seul non plus. Un nouveau monde s’offre à vous! Courage!

Je termine cet article avec un message que j’ai publié antérieurement sur mon blog Fb.

« Merci à tous les parents de bonne volonté, qui sont les bienfaiteurs de leurs enfants autistes et n’acceptent pas la façon dont la société impose une norme qui finira de toutes façons par changer (comme toujours, c’est vérifiable historiquement). Courage, tout ça n’est pas vain!
Un jour ce sont eux qui vous remercieront de les avoir soutenu, d’avoir été patients et bienveillants.

Il fut un temps où l’on contrariait les gauchers car la norme c’était d’être droitier… (Contrarier un gaucher provoque des troubles psychiques, qu’il n’aurait jamais eu si on l’avait laissé être lui même). De fausses croyances prêtaient des intentions diaboliques aux gauchers, alors que la population de gauchers/droitiers est une population « stable », il n’y a pas moins de gauchers aujourd’hui qu’il y a 200 ans, on leur fout juste la paix maintenant, on leur met des outils adaptés à leur disposition, pour qu’ils soient facilités dans leur vie de tous les jours. Être gaucher n’est plus une tare et fait partie de la « norme » actuellement…

On peut faire ça avec des tas d’autres particularités. La société est vouée à évoluer au fur et à mesure que l’humain s’arme de connaissances. La société apprend de ses erreurs, ou alors elle les reproduit éternellement.

Tout ce que je souhaite c’est qu’un jour l’autisme fasse partie de la normalité dans une société future, plus tolérante, plus ouverte d’esprit et mieux informée. Ainsi on mettra naturellement les outils à disposition de chacun pour qu’il avance le mieux possible, en respectant son intégrité. »

Que la force des cuillères soit avec vous!  (Just_autist)

 

6 Commentaires

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    • Magali sur 27 août 2018 à 22 h 05 min
    • Répondre

    Merci du fond du coeur… Ça fait du bien de vous lire.
    Magali maman d’un aspi de 17 ans.

    1. 🙂

    • Gassi sur 3 septembre 2018 à 23 h 29 min
    • Répondre

    Merci beaucoup pour ce super message. De tout ce que j’ai lu en un an, c’est votre texte qui m’éclaire le plus.

    Mon fils a été diagnostiqué TSA l’an dernier à l’âge de 2ans.

    Bonne continuation

    1. Merci pour ce retour positif, je publierai bientôt un article sur des sites qui vous permettront de vous informer au mieux 😉
      Plein de cuillères pour vous et votre petit garçon 🙂

    • Marie sur 12 septembre 2018 à 21 h 40 min
    • Répondre

    Merci merci merci 😊
    C’est beau, c’est vrai, c’est une lecture qui fait du bien !

    1. 🙂

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