Retour à Art & Autisme

La famille d’abord… encore !

Bonjour, bonsoir à tous!

Aujourd’hui, j’aimerais vous parler d’un petit quelque chose qui me chiffonne.

En ce début de mois d’avril avait lieu « la semaine de l’autisme ». A cette occasion,  j’ai participé à des interventions dans des bibliothèques, en partenariat avec l’association Ludosens (peut-être en reparlerons-nous un jour). Dans ces bibliothèques, il y avait, sur des petits présentoirs, des livres à propos de l’autisme. Sur les petits meubles se trouvaient quelques pavés que j’ai oublié, « L’empereur c’est moi » d’Hugo Horiot, et enfin, trois autres livres : l’album illustré de « Mon petit frère de la lune » de Frédéric Philibert (dont je ne parlerai pas car c’est loin d’être une catastrophe, mais il reste malheureusement concerné par le sujet) , et ces deux-là :

« Chez nous c’est comme ça »

 

« Chez nous c’est comme ça », écrit par Julia Erskine Poget (psychologue suivant des familles de personnes autistes) et Stephanie Durrelman (linguiste spécialiste du développement du langage dans l’autisme), et illustré par Pascal Garnier, il est édité par AFD chez qui chaque contenu publié est consacré à l’autisme et à divers troubles mentaux. Il s’agit de la première œuvre que je lis provenant de chez eux, mais je vous encourage à aller y jeter un oeil vous-même…

Ladite oeuvre, donc, est un récit de témoignages de frères et sœurs de personnes autistes, souvent enfants ou adolescentes, et sur la difficulté du quotidien avec ces dernières, comme dans beaucoup d’œuvres de témoignages. Il est tiré de témoignages donnés par les enfants suivis par Julia.

Et il y en a assez peu à dire, de ce livre, si ce n’est que c’est un énième témoignage familial, avec la particularité de donner la parole à des enfants, avec certes beaucoup de négatif, mais d’une façon bien plus spontanée et infiniment moins malsaine que les fameux témoignages d’adultes. Enfin… sauf avec le chapitre final intitulé « Notre livre », qui gâche un peu cet aspect du bouquin.

Ce dernier sert à poser une sorte de conclusion avec tous les enfants ayant témoigné, réunis dans un groupe de rencontre pour frères et sœurs d’autistes, ayant lieu tous les jeudis. Tout ce petit monde décide d’écrire un livre, aidés par une femme nommée Céline, qui va illustrer leur œuvre.

On ignore à quel point cette scène est tirée de la réalité, bien que cette Céline soit clairement fictive, étant donné que l’illustrateur réel est un homme. Et ce détail, il donne le doute : Ce groupe existe-t-il réellement ? A quel point les enfants sont-ils impliqués dans le témoignage ? Par Dieu, par Schovanec, c’est incompréhensible ! Et impossible d’avoir des informations sur ce sujet. Ce qui donne une impression de coup d’épée dans l’eau.

Mais bon, ce n’est rien comparé au suivant qui, lui, est une fiction :

« Mon frère, mon enfer, mon bel enfer, [l’autisme] »

 

Mon frère, mon enfer, mon bel enfer, [l’autisme], par Sandrine Andrews et Christine Deroin, édité chez Oskar jeunesse dans la collection « Pas de panique, c’est la vie ! ».

Il faut savoir que cette collection rassemble des livres donnant les différents points de vue de membres de la famille, dont un membre est neuroatypique d’une façon ou d’une autre, tel que par exemple dans « Mon frère n’est plus connecté dans la tête [La schizophrénie] ». Des titres somme toute capables de mettre à l’aise avec le sujet (c’est du sarcasme) !

L’objet de cette courte critique est divisée en deux parties : L’histoire, et une interview du psychologue M. Patrice Gilet (neuropsychologue) avec la participation de Catherine Barthélémy (pédopsychiatre).

L’histoire, d’abord : On y suit les points de vue respectifs de Garance, sœur d’Adam, un autiste déficitaire qui passe son temps à pleurer à cause de lui, et Hugo, nouveau dans la classe de Garance, qui va tenter de s’approcher d’elle malgré sa peur visible pour les personnes différentes. Le tout est un conglomérat de clichés autour de l’autisme par le biais d’Adam, le tout enrobé par des malheurs et la relation amoureuse qui se forme à la fois grâce à et malgré cet enfant si différent. Cerise sur le gâteau, une fin assez abrupte où Garance et Hugo finissent par passer un week-end ensemble avec le père d’Hugo, qui s’occupe du petit parce que, oh miracle, Hugo a accepté d’accueillir sous son toit la chose étrange qu’est Adam, après une romance aussi développée que le cerveau d’un doudou.

L’interview, quant à elle, est assez classique. Nous tiquerons néanmoins sur l’utilisation du mot « maladie » dans une des questions (« l’autisme est-il une maladie qui touche le développement du cerveau ? »), qui n’est pas remise en question et l’association « vaincre l’autisme » citée parmi la liste d’associations offertes gracieusement à la fin. Petit détail que je me dois de souligner : Il n’y a pas que des associations françaises qui sont citées, ce qui peut se révéler utile, mais préférez aller vous renseigner sur internet plutôt que de dépenser de l’argent pour ça.

Il me semble négligeable de préciser que je n’ai que très moyennement apprécié ce petit rassemblement de pages, élu au prix Handi « Meilleur Livre Jeunesse Adolescent ».

Mais pourquoi parler de ça ?

J’y viens, chers lecteurs et lectrices, j’y viens.

Ce que je cherche à souligner, c’est que les livres écrits par des proches de personnes avec TSA sont très souvent mis en avant par rapport à d’autres -vous me direz, on en a l’habitude- mais surtout qu’ils ont été mis en avant et à disposition de tous gratuitement, lors d’une semaine de sensibilisation où il faudrait écouter les principaux concernés en premier.

Je ne blâme pas les personnes responsables en bibliothèque, nullement, mais une tendance globale : La famille avant le ou la concerné(e). Certes, beaucoup de personnes en situation de handicap ont du mal à s’exprimer, mais bien d’autres le peuvent et il est alors dommage que ce ne soit pas eux qui occupent le devant de la scène.

Parce que oui, les livres de proches souffrant ou usant de leurs visions neurotypés sont on ne peut plus prisés. Il suffit de voir le succès de « Ted, drôle de coco », dont j’ai parlé dans un autre article, ou encore celui de la BD « les petites victoires »,  ou de « mon frère, mon enfer, mon bel enfer » qui a remporté un prix, les productions cinématographiques dont vous devez connaître les titres par cœur…

Vous connaissez la rengaine à force. « Représentation », on pourrait croire que je n’ai que ce mot à la bouche !

Le bonheur, aux yeux du lectorat, c’est bien souvent catégorisé comme étant chiant, même quand il est nuancé, alors que quand c’est un « exemple » (comprenez ici : Un parent courageux qui réussit à sortir son enfant du handicap pour qu’il ait l’air le plus normal possible, avec au mieux des méthodes forcings avec risque de rendre l’enfant malheureux, au pire un soupçon de charlatanisme avec présentation d’astuces miracles), ou du drame (Fiction ou réalité, c’est la même : entre fétichisme et voyeurisme), les ventes grimpent.

Bien sûr ici on parle autisme, mais ceci vaut pour n’importe quel handicap. Il suffit de voir la fameuse affaire Anne Ratier qui a fait sacrément parler d’elle en Mars 2019. Si jamais vous souhaitez en savoir plus, je vous laisse la vidéo d’une personne dont j’apprécie énormément le travail (rassurez-vous, aucun extrait de la vidéo d’origine n’est montré).

Cet exemple peut vous sembler extrême, mais des cas comme ça il y en a tous les jours. Le seul moyen de changer les choses est de transmettre le savoir. Et oui, pour ça, on peut parler d’autre chose que de souffrance constante. Il ne s’agit pas de silencer les personnes qui ont des choses à dire, tant que ça reste pertinent, mais à moins de miraculeusement mettre d’un coup les productions des personnes en situation de handicap en avant, si les porte-étendards choisis par la société  ne montrent pas que les gens comme nous peuvent avoir une vie heureuse sans grand drame dû au handicap, je vois mal comment la société pourrait réellement évoluer un jour vers un meilleur sens pour tout le monde.

Chise

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